Au nom d’une immuable liberté
La peine de
mort rétablie par … délégation ?
Nils Anderson (janvier 2002)
C’est au nom de la lutte contre le terrorisme, d’une
prétendue « liberté immuable » que l’un des principes fondamentaux de
l’Union Européenne, l’abolition de la peine de mort comme condition sine qua non de l’adhésion, risque
d’être anéanti.
C’est en tout cas ce que l’on peut craindre suite
aux révélations faites à Bruxelles par l’hebdomadaire European News. En effet, celui-ci fait état dans son édition de
cette semaine de négociations avancées entre « fonctionnaires des USA et de l’UE [qui] sont en train d’étudier
les modalités d’extrader en Amérique les individus soupçonnés de terrorisme
dans le cadre du nouveau mandat d’arrêt européen et sur la base de l’assurance
de la non application, dans certains cas, de la peine capitale ».
Pour sa part, le nouvel ambassadeur étasunien auprès
de l’UE, Rockwell Schnabel, a été bien plus explicite. Il a affirmé que « l’opposition à la peine de mort dans
les pays européens constitue un obstacle majeur à l’adoption de mesures plus
dures contre le terrorisme international ». Il a aussi suggéré la
manière pour contourner cet obstacle en affirmant que « on pourrait imaginer que les personnes soupçonnées de terrorisme
soient extradées dans mon pays où la peine capitale est autorisée et que, dans
certains cas, on pourrait renoncer à l’appliquer ».
Il s’agirait, ni plus ni moins, puisque la peine de
mort est bannie en Europe d’en déléguer l’application aux USA, tout en laissant
la porte ouverte à certains arrangements possibles si cela devait par trop
choquer les opinions publiques européennes. Cette logique constituerait une
rupture totale avec les pratiques et les lois en vigueur en Europe du fait
qu’aucun pays membre de l’UE n’autorise l’extradition vers les USA de personnes
qui pourraient encourir une condamnation à la peine capitale.
Peu nombreux sont les médias qui se sont fait écho
de ces nouvelles. Cela est d’autant plus inquiétant que, d’après M.
l’ambassadeur Schnabel « divers pays
qui ont des lois différentes devront modifier leur Constitution ».
Mais, ajoute-t-il, « un accord
existe déjà pour aller dans cette direction ». Cela devient encore
plus grave lorsqu’on songe que, en vertu des décrets d’exception édictés aux
USA –et qui constituent de facto une abrogation du Bill of Rights- le délit de
terrorisme est désormais étendu aussi au « soutien
idéologique sans participation active » aux actes de terrorisme...
(pg)